Révérend Reigen Wang Genh

Valeurs du Bouddhisme et Valeurs Républicaine

Licra Neuilly-Défense 3 février 2011

Cycle de conférence : Laïcité, Démocratie, République Française
Valeurs, Religions et Autres modes de pensée

Synthèse de la conférence du Révérend Reigen Wang Genh _ « Valeurs du Bouddhisme et Valeurs Républicaines »

Introduction : Origines du Bouddhisme

Il y a 2600 ans, Le Bouddha (signification : « celui qui s’est éveillé ») a commencé à transmettre le Dharma (signification : « l’enseignement »). Au début, il n’était pas Bouddha, c’est vers l’âge de 30 ans qu’il a commencé cette transmission, laquelle s’est ensuite étendue à toute l’Asie. Le Bouddhisme est sans dogme, l’enseignement transmis est celui de l’expérience, à chacun de refaire l’expérience qu’a faite par le Bouddha en son temps. Ainsi le Bouddha disait à ses disciples : « Ne croyez pas ce que je vous dis, faites votre expérience par vous-même avant de le croire »

Dans sa diffusion en Asie, le Bouddhisme s’est adapté aux cultures locales. Etant sans dogme, il en résulte des traditions bouddhistes très différenciées selon les pays et propres à chacun des pays.

Le Bouddhisme en France
Le Bouddhisme est présent en France depuis 50 à 60 ans, par suite de l’arrivée de migrants d’Asie, qui ont apporté avec eux leurs traditions et leurs clergés. A la fin des années soixante plusieurs Grands Maîtres Bouddhistes sont venus s’installer en France pour répandre le Bouddhisme en France puis dans toute l’Europe.

La France, par ces deux phénomènes est devenue une terre d’accueil du Bouddhisme singulière :

  • En région Ile de France, toutes les traditions bouddhistes de l’Asie sont représentées,
  • Pour la première fois depuis l’enseignement de Bouddha et après la diversification des traditions en Asie, ces différentes traditions pratiquent ici côte à côte.

C’est une des raisons pour lesquelles, quand le Grand Patriarche de Thaïlande a décidé d’offrir des reliques du Bouddha Historique à un lieu de culte du Bouddhisme hors d’Asie, le choix s’est porté sur la France, à savoir la Grande Pagode de Vincennes.
L’autre raison est la grande proximité, constatée par les Grands Maîtres de la Grande Pagode de Thaïlande, entre les valeurs du pays des Droits de l’Homme et des Lumières et les valeurs du Bouddhisme.

Aujourd’hui il est considéré que la France compte un million de bouddhistes pratiquant et cinq millions de sympathisants, personnes qui pratiquent la méditation bouddhique sans se déclarer bouddhiste.

Le Bouddhisme est une religion
Le Bouddhisme a tous les oripeaux d’une religion (culte, clergé, laïcs…)
Le Bouddhisme n’est pas une religion théiste et notamment pas monothéiste (Bouddha n’est pas un Dieu), n’a pas de livre sacré, n’a pas de dogme.

Ces trois faits constituent des obstacles dans le monde des religions monothéistes pour considérer que le Bouddhisme est une religion. Une fois que l’on a franchi ces obstacles, il est facile de reconnaitre que le Bouddhisme contient l’esprit religieux qui relie naturellement, à l’essentiel, à la transcendance.
Le Bouddhisme est donc une religion non théiste, une religion de l’expérience. A ce titre le Bouddhisme est, depuis 2007, invité à la cérémonie des vœux aux cultes à la Présidence de la République.

Les fondamentaux de l’enseignement du Bouddha et Les valeurs du Bouddhisme Nous pouvons en citer deux qui expriment bien cette « religion d’expérience » : la réalité de l’impermanence et la réalité de l’interdépendance.

Toute chose en ce monde est impermanente, rien ne dure, rien ne persiste. Chacun l’observe chez les autres, mais chacun a du mal à l’accepter pour soi.
Il y a deux façons de l’accepter :

  • La porter sur son dos et c’est aller vers le fatalisme,
  • L’intégrer dans sa propre vie comme une réalité universelle et c’est supprimer beaucoup des souffrances qui résultent de l’impermanence non acceptée, non préparée.
    Le Bouddhisme, c’est intégrer l’impermanence dans son corps, dans son mental, dans ses actions. C’est donc entre autres ne pas essayer de définir, de figer sa personnalité.

L’interdépendance est aujourd’hui omniprésente, elle l’était aussi au temps du Bouddha mais avec un temps de réaction plus étalé : rien ne fonctionne séparément, l’humanité est un seul corps de même que l’intégralité de la nature. C’est la relation aux autres, à la société, au monde.
Cette interdépendance doit aussi être intégrée dans le corps, dans le mental et dans les actions. En effet si je me considère comme indépendant, je regarde le monde comme extérieur à moi et c’est la source de tous les problèmes. C’est le drame des sociétés d’aujourd’hui avec la montée de l’individualisme.

C’est l’enseignement de ces fondamentaux et l’éveil à ceux-ci qui fondent les valeurs du Bouddhisme.
Le Bouddhisme préfèrerait parler d’idéaux, vers lesquels tendre par l’expérience, plutôt que de valeurs. En effet, parfois, les valeurs sont une façon de se donner bonne conscience.
Le Bouddhisme à des difficultés avec les notions figées du mal et du bien et préfère parler de ce qui est nuisible (crée de la souffrance) et de ce qui est bénéfique (contribue au bonheur).
Avec l’intégration du corps, du mental, de la parole et de l’action, les trois préceptes fondamentaux sont :

  • Ne fais pas de chose nuisible,
  • Fais des choses bénéfiques,
  • Agis toujours pour le bien de tous les êtres.

Les valeurs du Bouddhisme et les valeurs de la République Française

La laïcité telle que définie par la République Française convient parfaitement au Bouddhisme, car c’est une laïcité ouverte permettant à toutes les religions de vivre et de s’exercer, et de vivre ensemble.
Réciproquement, le Bouddhisme, religion de l’expérience qui s’adapte à toutes les cultures et qui donc ne peut être une religion prosélyte, est par nature une religion laïque.

Quand à la devise de la République Française, elle est vue par le Bouddhisme à l’aune des deux réalités de l’impermanence et de l’interdépendance.
Liberté : Pour le Bouddhisme, c’est la liberté intérieure, se libérer de ses propres attachements, de soi-même.
On n’agit plus alors en fonction de son propre mental mais en s’ouvrant à la réalité de l’interdépendance et c’est aussi libérer l’autre. Il n’y a plus ni pour soi, ni pour l’autre d’enfermement dans des catégories.
Egalité : Devant l’impermanence, réalité pour le Bouddhisme, tous les hommes sont égaux. Au contraire quand on regarde l’égalité de façon autocentrée et figée, on crée de la souffrance pour soi, car on n’accepte pas sa propre condition au regard de celles des autres.
Fraternité : Le Bouddhisme parle peu d’amour et beaucoup plus de compassion. La sagesse du Bouddhisme avec la réalité de l’interdépendance c’est s’éveiller à la compassion, c’est-à-dire partager les souffrances, les joies, la vie des autres.

Le fond de toutes ces pratiques, c’est l’apaisement de l’esprit de l’être humain, lequel souffre parce qu’il a peur de soi, des autres. Il s’agit encore d’une expérience individuelle.

En guise de conclusion : Au lieu de la phrase d’André Malraux « le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas » ce qui crée une opposition immédiate entre le matériel et le spirituel, je préfère l’exprimer un peu différemment, c’est « le XXIe siècle sera méditatif ou ne sera pas » : c’est-à-dire qu’il devient vital pour l’avenir même de l’humanité que l’être humain s’éveille à ce qu’il est et devienne pleinement responsable de ses actes.

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